📷© Evenice
Comment s’initier à l’improvisation théâtrale ? Plongée dans un cours de Sophia Madar chez Evenice à Paris, comme si vous y étiez !
« L’esprit d’improvisation est un défi au sens créateur. » a dit Charlie Chaplin en 1964 dans son autobiographie intitulée « Histoire de ma vie ». C’est pour vérifier ses dires, entre autres, que Sophia Madar, fondatrice de l’école Evenice en 2020 (contraction d’évènement et icebreaker), metteure en scène, professeure de théâtre depuis 20 ans, a gentiment accepté de m’accueillir le mardi 13 mai 2025 pour participer à son cours. Et c’est dans une salle d’activités culturelles et sportives, dans le 11e arrondissement, que tout s’est joué ! Soit deux heures, avec sa troupe d’une dizaine d’élèves du mardi.
Tout d’abord, le cours d’improvisation commence par une ronde. Sophia demande à ses élèves d’exprimer leurs ressentis d’être présents. La séance débute donc par un moment consacré à l’expression des émotions et des remerciements, et se termine par le partage des impressions de chaque élève. Elle met un point d’honneur à créer une atmosphère de groupe où la solidarité et la bienveillance priment, d’autant plus que je suis l’élément perturbateur du soir, comme toute bonne pièce de théâtre qui se respecte, finalement. Nous commençons par un exercice de vivacité avec la transmission de claquement de mains, cela nous permet de nous mettre dans l’ambiance, puis faire un suivi de la main d’un partenaire en mode miroir. Nous passons ensuite aux choses sérieuses : il s’agit de dire une courte phrase au départ et de la compléter chacun son tour. Nous partons sur une histoire de Licorne et à mon passage, je lance l’idée que la créature légendaire n’a plus de corne. Cela permet de s’aventurer avec imagination dans des situations délirantes pour les suivants !

Par la suite, Sophia passe au « Qui, quoi, où » en duo. Elle propose un mot sur lequel deux élèves dos à dos doivent immédiatement se retourner et entamer une improvisation compréhensible de 30 secondes. Les mots shérif, théâtre, luxe, désaccord, coup de soleil, piscine, gâteau suivent.
– En impro, le premier qui parle a raison, rappelle Sophia. Au passage du premier duo avec le mot naissance, elle intervient.
– Là, ce n’était pas assez clair pour moi, on recommence, lance-t-elle.
– Désolé, répond Anthony.
– Non, il n’y a pas de soucis. Ne faites pas intervenir au début de l’impro un troisième personnage, ne sortez pas votre téléphone, et que l’on sache bien dès le début de quoi il s’agit. Et pensez à parler plus fort, car durant le spectacle il faut que tout le monde puisse entendre correctement. Effectivement, car les deux groupes d’impro se produiront mi-juin à l’Auguste Théâtre à Paris dans le 11e !
– Naissance, c’est parti relance-t-elle.
Effectivement, la seconde impro est mieux gérée par le duo à la satisfaction de Sophia.
Dehors, des klaxons se font entendre dans la rue comme pour féliciter les élèves. Charles se lève et ferme la porte vitrée pour plus de confort sonore.

L’activité suivante présentée par Sophia monte en difficulté. Un narrateur soumet une situation à deux élèves qui doivent, en plus du « Qui, quoi, où », introduire un conflit qui finit positivement. Je prends le rôle de narrateur en imaginant un entraîneur de football, Simon, seul dans le vestiaire avec son meilleur joueur, Anthony, avant son entrée sur le terrain lors d’une finale. Sauf que ce dernier a une relation avec la femme du coach qui vient juste de l’apprendre… Tout finira bien avec un but victorieux de l’amant.
– 3, 2, 1, impro ! scandent tous les élèves en chœur à l’unisson de Sophia, tous assis en face des deux protagonistes. L’accent du midi a été bien choisi par Anthony, on aurait pu croire entendre Eric Cantona ! Mais à un moment donné dans le feu de l’action, il s’est mis à le perdre, et la professeure le lui fait remarquer immédiatement. Anthony repart de plus belle. À la fin fin du coup de pied vainqueur, Simon se roule par terre de joie avec son rival. Tout est oublié ! Tout le monde se met à rire et à applaudir.
C’est à mon tour d’entrer en scène. Je dois jouer avec ma partenaire, le rôle d’un chirurgien en boîte de nuit qui rencontre par hasard une collègue infirmière, Virginie. Le tout pimenté par le fait que le praticien s’est formé avec des tutos sur YouTube !
– 3, 2, 1, impro !
Je me mets dans l’ambiance musicale de la boîte en me dandinant et en fredonnant une chanson…
– Ah super la musique ! fais-je autour de moi.
– Pierre-Maurice ? s’étonne une femme. Quelle surprise de vous voir ici.
– Ah Virginie ! en la prenant par le bras, tout en s’éloignant et en lui parlant discrètement. Et bien quoi, je n’ai pas le droit de m’amuser ?
– Si, mais pas dans un endroit comme celui-là…
– Tout va bien, tout va bien, Virginie. Mais il est tard, il serait peut-être temps de rentrer chez vous, non ?
Je finis par apprendre à Virginie que ma formation en médecine s’est faite en réalité sur YouTube, et pour enrober la terrible information, je la saisis et la colle à moi.
– Et si on dansait un slow ? Pour oublier tout ça ! Allez, soyons fous.
– Non, je ne crois pas…
– Allons-y, allons-y Virginie ! Je me mets à virevolter avec ma cavalière dans mes bras contre son gré. Virginie ! Virginie ! crie-je en mode amouraché.
Ça rigole dans la salle. Sophia interrompt la prestation.
– C’était bien, c’était très bien. Vous avez installé tranquillement la situation initiale. Le conflit est aussi arrivé tranquillement dans la conversation. Comment vous êtes vous senti Marc ?
– Bien ! C’était amusant à faire.
– Et Virginie, pas trop chamboulée ? fait Sophia, en riant et en se levant. Elle installe quatre tabourets au centre de la salle pour simuler l’intérieur d’un véhicule. Quatre élèves prennent place à tour de rôle avec un scénario libre mais ils doivent faire ressortir une émotion.

Abdilah est le second à prendre place sur le siège passager, tout en pleurant la mort prochaine de son chien malade auprès de Thomas, le conducteur. Je me dis que si j’avais été de la partie, j’aurais fait le rôle du chien qui saute dans la voiture retrouver son maître. La prochaine improvisation en quatuor qui suit va me donner l’occasion d’expérimenter finalement mon côté « animal sauvage ». En effet, sans se concerter bien sûr, sur cet exercice, Charles se prend pour un chauffeur de camion de…cirque ! La perche tendue, je la saisis au vol pour interpréter un tigre toutes griffes dehors qui a tendance à lever la patte abusivement dans de terribles grognements. Rires assurés !
Dernière ligne droite de la soirée avec l’impro intitulée « La peau de chagrin » où d’une situation donnée par Sophia, trois élèves doivent jouer la même scène trois minutes, une minute trente, quarante cinq secondes et pour finir en quinze secondes ! Les sujets ? « L’inspiration me poursuit » puis « La découverte d’un nouveau monde ». C’est enlevé et très drôle au fur et à mesure des prestations de plus en réduites par le chrono.
Charlie Chaplin avait raison : l’improvisation représente un véritable défi, certes, mais tellement jubilatoire à affronter ! Sophia Madar se positionne comme une véritable guide qui révèle les talents cachés de chacun. Sa conviction, son implication et sa bienveillance auprès de ses élèves fait plaisir à voir, et elle déploie tous les efforts nécessaires pour faire jaillir le meilleur de chaque participant. Je vous invite grandement à suivre ses cours dispensés à la rentrée d’octobre dans le 9e arrondissement qui promettent une expérience théâtrale réjouissante.
Par Marc Bélouis / Humanvibes le 02/09/2025
Et pour aller plus loin :
La page Facebook d’Evenice et la chaîne YouTube d’Evenice.
Le travail de metteure en scène de Sophia Madar…en musique.
Marc / Humanvibes